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  • : Chroniques ordinaires d'une socialiste de Haute-Garonne.
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On est socialiste à partir du moment où l'on a cessé de dire « bah,  c'est l'ordre des choses et nous n'y changerons rien », à partir du moment où l'on a senti que ce prétendu ordre des choses était en contradiction flagrante avec la volonté de justice, d'égalité et de solidarité qui vit en nous.

Léon Blum

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3 mars 2013 7 03 /03 /mars /2013 20:40

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L'ANI (Accord National Interprofessionnel) du 11 janvier 2011 dit de "sécurisation du marché de l'emploi" prévoit dans son article 18 la mise en place d'accords dits de "maintien dans l'emploi". En voici l'introduction :

Article 18 – Accords de maintien dans l’emploi

Afin de maintenir l’emploi, en cas de graves difficultés conjoncturelles rencontrées par une entreprise, il convient de se doter, à côté de dispositifs existants tels que le chômage partiel, de la possibilité de conclure des accords d’entreprise permettant de trouver un nouvel équilibre, pour une durée limitée dans le temps, dans l’arbitrage global temps de travail / salaire/ / emploi, au bénéfice de l’emploi.

( Consulter le texte de l'ANI et l'annexe sur l'article 18 ici ).

Je voudrais partager une expérience concrète sur ce sujet, à travers l'exemple de Continental et du plan qui avait été proposé en 2010 aux salariés de Continental Automotive France, pour les sites de Toulouse, Foix et Boussens, et que j'avais suivi de près au titre de mes responsabilités syndicales Métallurgie CGT.

Début 2010, la direction de Continental annonçait un plan visant à une réduction de 8% du "coût du travail" en échange d'une "garantie de l'emploi" jusqu'en 2015. Nous étions alors en pleine crise. En Haute-Garonne, nous avions déjà connu les annonces de Molex et de Freescale (Freescale étant situé quasiment en face de Continental Toulouse) qui ne devaient pas grand chose à la crise mais jetaient une chape d'angoisse sur les salariés de l'industrie, alors que l'Ariège était depuis longtemps touchée par la désindustrialisation. Malgré ce contexte, à Continental, après du chômage partiel en 2009, les sites concernés dégageaient des bénéfices conséquents. Le dossier devint national et les médias s'emparèrent de ce qui fut appelé, à raison, un chantage à l'emploi. CFDT et CGT, majoritaires ensemble, utilisèrent leur droit d'opposition pour s'opposer au plan, signé par des syndicats minoritaires. Après plusieurs mois, pas mal de péripéties et beaucoup de tensions, le plan fut finalement abandonné.

Aujourd'hui, 3 ans après, la direction de Continental communique largement sur les excellents résultats et les perspectives favorables de l'entreprise. Tant mieux ! Pourtant, que n'a-t-on pas entendu alors sur les risques majeurs et l'irresponsabilité à ne pas signer cet accord.

Dans l'entreprise, on connut des Assemblées Générales plus qu'houleuses, des attaques directes contre des délégués, une pétition organisée par des salariés "apolitiques" qui demanda la démission des élus du CE. Un référendum fut organisé, posant question aux syndicats majoritaires, qui finalement choisirent d'appeler à son boycott (pour se replonger dans l'ambiance, ici page 5, un article écrit dans le Journal de la Fédération Métallurgie CGT). Tensions, inquiétudes, tout était là. C'est qu'au plus fort des menaces, 1000 emplois furent mis en balance (dans un entretien à La Dépêche du directeur du site, que d'ailleurs je ne retrouve plus en ligne, mais qui est bien paru le 9 octobre 2010). En dehors de l'entreprise aussi, les pressions furent palpables. J'ai souvenir d'une réunion de médiation en Préfecture, où le président du CESR, pourtant médiateur, mit tout son poids pour tenter de convaincre de la qualité de ce plan. J'ai souvenir de ces élus s'interrogeant sur l'emploi, et convaincus que si les sites français ne signaient pas ils seraient fermés ou durement touchés au détriment des sites allemands.

Pourquoi rappeler ces épisodes ? Parce que j'ai parfois l'impression que certains ont du monde du travail une vision, disons, bisounoursique ! La démocratie sociale, oui. Mais ôter la protection de la loi pour forcer le contrat dans des domaines touchant aux fondamentaux du contrat de travail, alors que l'on sait combien les conditions de ces choix sont rarement sereines et équitables, est injuste et dangereux. Car oui, dans l'industrie (pour ne parler que de ce que je connais), il y a toujours eu, et il y a encore, des discriminations syndicales qui mettent la pression sur les récalcitrants et des syndicats "maison" prêts à tout accompagner. Et oui, il faut beaucoup de ténacité et de courage pour ne pas céder aux inquiétudes concernant son emploi et entamer ce qui est toujours un difficile et incertain bras de fer. 

Mais ce n'est qu'un exemple, me rétorquera-t-on. Soit, en voilà un autre : Continental Clairoix. Les syndicats signèrent un accord de ce type en 2007. En 2009, pourtant, Continental décidait de la fermeture du site. Bosch, General Motors, les exemples célèbres ne manquent pas. Peut-on comprendre alors que le mot confiance n'ait en ce domaine pas de sens ?

On me dira que c'est un compromis, qu'il offre des garanties. Je n'ai rien contre les compromis, au contraire, c'est l'essence de la négociation. Mais pas à n'importe quel prix. Quant aux garanties, regardons-y bien. Un article pris  dans l'annexe à l'article 18 de l'ANI m'interpelle :

Article 10 - Procédure de mise en cause

 Compte tenu de la spécificité des accords de maintien dans l’emploi, et des situations qu’ils ont pour objet de redresser, il est nécessaire, par dérogation au régime des accords à durée déterminée, de prévoir des modalités de mise en cause ou de modification :

- à l’initiative de l’employeur qui fait état d’une détérioration importante de la situation économique, ne permettant pas d’atteindre les objectifs fixés en poursuivant l’application de l’accord

- à l’initiative des organisations syndicales de salariés en cas de conflit sur le non-respect de l’accord,

- à l’initiative de l’une ou l’autre partie en cas d’amélioration significative de la situation de l’entreprise, justifiant une telle mise en cause.

Certes, on prévoit une remise en cause positive. Mais la remise en cause par l'employeur "en raison d'une détérioration importante de la situation économique" me rappelle trop la formule du plan de Continental : "pas de licenciements contraints, sauf cas de force majeure". Une garantie, ça ?

Et pour finir, la position du PS de Haute-Garonne sur la situation à Continental, à l'époque.

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